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My Pet Monster : un (monstrueux) copain pour la vie

Le monde merveilleux des peluches n'a pas toujours été infesté de licornes et d'animaux de compagnie au regard triste invitant à une adoption compu/impu-lsive. Comme s'il semblait vital de réprimer à tout prix le mordant et l'instinct carnassier d'une progéniture que l'on sait - pour la côtoyer en tentant tant bien que mal de l'éduquer – naturellement encline à baver en lâchant des rires terrifiants, les monstres se voient depuis trop longtemps relégués au ban de ce monde fluffy et politiquement correct.

Triste constat : pour un « adulte » ayant grandi dans les années 80 (aka « la meilleure décennie ever sur le plan purement créatif et sans aucun biais de la part de l’auteur de ce texte, promis-juré ») : il suffit de se perdre cinq minutes au rayon jouets d’un supermarché pour s’emmerder sec. Mais il n’en a pas toujours été ainsi. Au cœur des années VHS, en 1986 pour être précis,  la société de cartes de vœux American Greetings souhaite se lancer à l’assaut d’un marché porteur : celui des peluches.

LA BÊTE EST BELLE…

Curieux choix d’exécutifs apparemment très à l’écoute de leurs petits psychopathes à domicile, la firme décide de relever le défi en créant une ligne de créatures monstrueusement sympathique via une nouvelle branche de leur compagnie : AmToys. Et, conformément aux coutumes éculées du pays du dollar et de l’opportunité commerciale, un moyen-métrage live gentiment naze (où le monstre éponyme est représenté à taille d’adulte) accompagne sa sortie, suivi d’une série animée de treize épisodes. My Pet Monster est né.

COUCOU ! Je suis "nez" !

Le concept est aussi simple qu’efficace. La bestiole, suffisamment grande (65cm debout, position qu’elle ne tiendra toutefois pas sans l’aide de son glorieux propriétaire) pour ne faire qu’une bouchée des Barbie(s) de votre petite sœur, impressionne. P’tit Monstre ou tout simplement Junior, puisque c’est son nom canonique (libre à vous de trouver mieux à l’unique condition que ce soit bien badass, ou nordique, ou les deux), bénéficie d’un sublime pelage bleu très fourni. Sa tête, (h)ornée de deux cornes en tweed rembourré, laisse apparaître une ligne capillaire mauve et orange de la même longueur que le reste de sa pilosité fournie.

Pour une bête agressive au point de devoir être menottée (nous y reviendrons), le bestiau est élégant, cohérent et finalement très propre sur lui. Son sourire idiot, renforcé par un gros pif en forme de cornichon, révèle six dents pointant vers le bas. Il n’y a guère que ce grain de folie qui habite son regard de braise pour trahir un quelconque plan machiavélique : foutre le dawa dans nos chambres.

Le protagoniste principal dans toute sa splendeur (et dans sa boîte d'origine)

… MAIS DIFFICILE À ATTRAPER

Nos chambres ? Évidemment !  Car comme tout ce qui a été pondu durant la décennie huitante, les peluches My Pet Monster s’arrachent aujourd’hui à prix d’or, indépendamment de l’âge de ceux qui les convoitent. Que ce soit pour combler un manque, à jamais indissociable d’une enfance révolue, ou pour faire un cadeau original à un gamin ingrat qui ne le mérite pas (et qui voudra un smartphone dans 3 ans), les quarantenaires du monde entier se cassent les dents sur Ebay pour réussir une adoption.

Et la bataille est d’autant plus rude que la gamme s’est rapidement – et brièvement – étoffée pour apporter de nouveaux amis (et un ennemi) à P’tit Monstre. USA obligent, ce dernier est vite rejoint par My Football Monster, du même gabarit mais assorti d’un maillot de football américain et d’un élégant casque en plastique bleu où deux trous laissent sortir des cornes massives. Sa mâchoire proéminente, dotée de 4 dents qui pointent cette fois vers le haut, ne laisse que peu de doute sur le coté ouvertement bourrin de celui qu’on appelle Harder, Better, Faster, Strongur.

Un gros bourrin prêt à tout pour atteindre la zone d'en-but de votre cœur

Là où le monstre original était livré nu à l’exception de ses menottes orange, ce dernier se voit accompagné d’accessoires… qui le rendent d’autant plus difficile à dénicher en état complet. Entre les autocollants du casque qui se sont fait la malle ou ont fini dans les selles de milliers de gosses qui ne méritaient décidément pas tant d’attention parentale (ou, au contraire, bien plus) et un maillot au transfert fragile (nous y reviendrons en détail), la créature sportive aura plus de chance de débouler à poils (de couleur bordeaux cette fois) que sur son 31.

LA FAMILLE S’AGRANDIT

Consciente que deux grosses peluches ne suffiront pas à combler la collectionnite aigüe des bambins biberonnés aux films de Joe Dante, AmToys en profite pour lancer cinq autres modèles plus petits et quadrupèdes : Gwonk, Rark, Wogster, Yaplet et Yiplet (ces deux derniers étant aujourd’hui les plus recherchés). Il est possible d’y glisser une main pour les transformer en élégantes marionnettes à la bouche souple et articulée. Il y en a même une rose, pour les filles à l’esprit étriqué qui se prennent pour des princesses. Les menottes, marque de fabrique de la ligne, sont ici réadaptées à l’échelle (voir encadré « Conseils de collectionneur »).

Finalement, une ultime peluche grand format rejoindra la fine équipe. Beastur, sobriquet de cet antagoniste au pelage mauve clair, se pose en Némésis ultime. Nous reviendrons plus en détail sur lui dans la catégorie « Perle Rare », mais sachez toutefois que son rictus menaçant fait de lui le troisième représentant la famille des museaux de plastique, subtile refonte coïncidant avec la sortie de la gamme sur le marché européen.

Le verso du packaging officiel, qui présente les variantes fourrure/plastique
Rark, Wogster et Gwonk (de g. à d.) complotent sûrement pour faire une connerie...

Voilà pour la vue d’ensemble d’une collection portant à huit le nombre total de designs originaux sortis des usines coréennes et chinoises mandatées par AmToys. Sachez toutefois – pour votre culture générale – que quelques exemplaires de Pet Monsters furent produits en France par Ajena, fabriquant renommé de doudous et autres peluches plus classiques, comme Kiki ou le Marsupilami. Maintenant que vous avez pris connaissance de l’ensemble de la collection,  il est temps de démarrer votre parcours du combattant.

VARIANTES ET HÉRÉSIES

Commençons déjà par faire le distinguo entre deux variantes de Junior et de Strongur. En effet, AmToys ressort nos bestioles favorites en 1988 et remplace leur espace buccal jadis en peluche par des  gueules en plastique. Pas foncièrement moches pour autant, ces Pet Monsters perdent un peu de leur superbe (ainsi qu’une vingtaine de centimètres) mais restent néanmoins très fréquentables.

Gare également aux tentatives de copies lancées dans la foulée par une concurrence opportuniste, à l’image notamment des Kuddlee Uglee et autres Zugly, qui font office d’effort louable, à l’inverse du plagia « sauce Wish » My Monster Buddy. Évoquons également les hideuses rééditions (qui ne concernent que le modèle « Junior ») sorties en 2001 chez Toymax et suivies, en 2009, par une version parlante encore plus laide. Quoi que…

Des variantes qui oscillent entre alternatives réussies, ersatz ratés et rééditions plutôt bof… (cliquez pour plus d’info)

UN COLOSSE AUX PIEDS D’ARGILE

Maintenant que vous êtes conquis et motivés à démarrer (ou compléter) votre collection, il nous reste à aborder un point crucial pour tout passionné d’objets vintage : celui du vieillissement desdits objets. Et on touche là au principal problème/défaut de la série My Pet Monster. S’il est presque impossible de trouver un exemplaire « mint in box » (allez expliquer à votre gamin de ne pas déballer sa peluche préférée le soir de Noël), il s’avère tout aussi compliqué de faire main basse sur une bestiole en bon état général.

Exemple typique d’une « vilaine peau » (©Benoît Poelvoorde), ou quand le revêtement des mains et pieds de nos adorables monstres se fait doucement la malle

Et pour cause : la matière utilisée pour enrober ses pattes et ses mains est une sorte de tissu à la texture finement plastifiée par une couche de simili latex. Et comme il est plus que probable que le monstre de compagnie adoré ait finalement fini ses jours à la cave ou au grenier (quelle indignité !), il y a fort à parier que ladite matière, rongée par l’humidité, s’est depuis longtemps effritée pour finalement peler comme une vieille cagole sur la côte niçoise. Au pire, les extrémités des membres de la bête finissent entièrement blancs. Dans 80% des cas, on constate un délabrement du tissu allant de 30% à 70%, laissant encore apparaitre quelques stigmates des ongles bleus jadis dessinés sur sa surface.

Les transferts du maillot de My Football Monster, qui vieillissent plutôt mal et s’effritent de la même façon que le combo mains/pieds

C’est principalement sur ce point que se négociera le prix d’occasion des trois (ou cinq si on compte les variantes aux gueules en plastique)  peluches grand format de la collection. Aucun danger du côté des petits modèles, intégralement composés de plastique durable et de tissu rembourré. En revanche, gare aux transferts recto et verso floqués sur le maillot du Football Monster, faits de la même matière que ses mains/pieds (oubliez toute tentative de lavage, même à la main) et rendant TRÈS rare un exemplaire complet et d’origine, sans compter le casque déjà évoqué plus haut.

LE JUSTE PRIX

Mais alors, combien coûte un Pet Monster d’occasion ? Si l’on met de côté les graals en état neuf ou excellent, affranchis de toute concurrence directe et pouvant de ce fait atteindre des montants stratosphériques, on estime un exemplaire moyen aux alentours de 100 € pour les grandes peluches de type Junior, pareil pour un Strongur nu (et plutôt autour des 160 € avec accessoires incomplets, type casque ou maillot, en état variable). Les marionnettes sont trouvables pour des sommes oscillantes entre 50 et 200 € selon le modèle (certains étant plus convoités que d’autres) et la présence de menottes.

Montants auquel s’ajouteront probablement quelques frais annexes, car même si les peluches furent un temps vendues en France, 90% des ventes se passent aujourd’hui en Angleterre (solution à privilégier malgré le Brexit) ou aux USA via Ebay… avec près de 100 € à rajouter (ça pique) au prix du monstre, répartis entre frais de port et de douanes si le vendeur passe par Ebay Global Shipping Program pour gérer l’envoi.

Entre des peluches en excellent état mais un peu chères et d’autres complètes mais hors de prix, il va falloir ouvrir l’œil, être patient(e) et négocier ferme

L’ENFANT, BRISEUR DE CHAÎNES ET GRAND LIBÉRATEUR

Laissé sans surveillance, Junior sera parfaitement capable de pourrir votre ratio à Call Of

Finissons par une petite réflexion métaphysique peu ou prou digne d’une cogitation brickosophienne. Parents facilement impressionnables ou fragiles millénials, vous vous demandez sans doute « pourquoi et AU NOM DE QUI ferai-je jouer mon gosse avec ce truc poilu plutôt qu’avec un Action Man ou une Bratz ? »

La question est légitime. C’est juste dommage de ne pas vous l’être posée au moment de passer en caisse avec un militaire sanguinaire ou une poupée maquillée comme une BMW volée, tout ça pour récompenser votre rejeton d’avoir obtenu son premier 7/10 en calcul. En plus c’est pas SI bien que ça, un 7/10. Mais vu les jouets que lui achètent ses parents, c’est déjà pas mal.

Bref, pourquoi adopter P’tit Monstre et sa clique ? Hé bien tout simplement parce que cette bête sauvage menottée peut servir de catalyseur freudien et permettre à l’enfant, qui expérimente ses premières notions de bien et de mal, de prendre conscience de l’universalité du Ying et du Yang. De l’existence du bien au sein du mal et inversement. Avec My Pet Monster, il apprendra à appréhender l’anormal, à cultiver la différence tout en faisant tomber quelques barrières mentales. Cerise sur le gâteau, l’enfant pourra choisir de briser les chaînes des créatures assujetties afin de libérer leur fureur… ou de sanctionner leur furie (imaginaire, espérons-le) par un retour aux fers.

Et si le mioche s’emporte et fait un transfert psychologique, précisons que – bien que solidifiées par de simples scratchs – les menottes s’adaptent parfaitement aux poignets d’êtres de taille moyenne pas foutues d’avoir au moins 8/10 en calcul. Et si l’on vous traite de parent indigne, libre à vous de blâmer les vôtres, qui ont préféré vous offrir un Wuzzle Rhinosinge plutôt qu’un Pet Monster lors d’un certain Noël 1987.

CONSEILS DE COLLECTIONNEUR

Point crucial si vous comptez vous lancer dans l’acquisition « en loose » de plusieurs peluches de la série : les menottes. Souvent égarées, souvent sciemment vendues à part par des spéculateurs peu scrupuleux, ces dernières sont d’autant plus chiantes à trouver qu’elles sont sécables. Gare, donc, à sélectionner le bon morceau (définissable via le maillon-lien de la chaîne) afin de ne pas vous retrouver avec deux morceaux identiques. Cerise particulièrement appréciée des collectionneurs fanatiques : les bracelets étaient à l’origine scellées par de petits plastiques blancs, bonus non négligeables qui garantissent un objet en état « plus mint tu meurs ».

Autre piège, bien plus subtil : il existe deux tailles de menottes. Une pour les monstres « grand format » et une pour les marionnettes. Il va falloir sortir le mètre et causer avec le vendeur en cas de doute puisqu’il est peu probable que la dimension déterminante soit mentionnée d’emblée.  C’est surtout la LARGEUR des bracelets qui fait ici foi. 3,7 cm pour les versions XL et 3 cm pour les versions S (à mesurer dans le même sens que si vous vouliez mesurer la hauteur des inscriptions MY PET MONSTER qui y figurent).

BONUS TL;DR

Petit aperçu de quelques figurines dérivées à travers les âges… (cliquez pour plus de détails)

Pour les accrocs aux 'member berries, voici un extrait du catalogue AmToy... 'member Madballs ?
Deux prétendus prototypes ont fait une mystérieuse apparition sur la toile il y a quelques années... l'équipe de MythBusters est sur le coup
On n'est pas bien ? Paisible, à la fraîche, décontracté des cornes ?
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