Dans l’univers LEGO, il existe de nombreuses villes canoniques qui correspondent à différents thèmes proposés par la marque. Que ce soit Ninjago City, Newbury (RIP Hidden Side), Heartlake City (Friends), aucune d’entre elles n’est aussi vieille et célèbre que Lego City, la ville historique de la marque. Elle voit le jour en 2005 lorsque les premiers modèles estampillés City sont commercialisés et succède à la gamme Town débutée en 1979. Dans les faits, ces deux gammes n’ont de différence que le logo City apposé sur les visuels des boîtes, consacrant ainsi les ensembles en un thème LEGO officiel.
C’est aussi un record de longévité pour une gamme n’étant pas tirée d’une licence. Inspirée de la vie réelle contemporaine, la gamme peut sembler tourner en rond en proposant régulièrement son lot de commissariats, caserne de pompiers et d’hôpitaux, en somme de services publics. Les impôts sont donc bien alloués, non ? (Non.) Il aura fallu attendre 2022 pour qu’enfin Lego City se dise qu’avoir une école serait une bonne idée pour offrir des alternatives aux carrières dans les forces de l’ordre. Il est d’ailleurs surprenant qu’aucun tribunal n’ait vu le jour, reléguant de fait la justice à un niveau comparable à une dystopie digne de Judge Dredd. Police partout, justice nulle part pour paraphraser Victor Hugo. Cheh.
Du diesel à l’électrique
Ci-dessus
Différents ensembles commercialisés par LEGO dans les années 80 en partenariat avec Shell.
Mais ce que la ville en briques affectionne le plus après la police et les pompiers, c’est l’automobile sous toutes ses formes. Et qui dit voiture, dit infrastructures, et fatalement énergies fossiles, donc changement climatique. En France, les transports représentaient en 2019 un bon quart de l’empreinte carbone des habitants. On comprend donc aisément que LEGO se devait de réagir afin de sortir d’une position de plus en plus inconfortable.
D’ailleurs, un autre écueil qu’à dû affronter la ville de briques fut la polémique Shell. Jadis, Lego City arborait fièrement le logo de la compagnie pétrolière jusqu’à ce que Greenpeace vienne jouer les troubles-fêtes, forçant LEGO à rompre son partenariat en 2014. On aurait pu croire à un début de prise de conscience écologique et environnementale suite à cette marche arrière de la marque, mais ce ne fut in fine que pour créer sa compagnie pétrolière fictive, Octan.
Cependant, Lego City évolue avec son temps et introduit de nouveau ensembles avec une thématique forte : la transition écologique. Fini les aéroports, le tout voiture, les hélicoptères ? Alors non, mais il y a des panneaux solaires sur les toits, du recyclage et des voitures électriques. On pourrait trouver la démarche anecdotique mais ce sont des petits pas dans la direction d’une ville en plastique ABS émancipée des énergies fossiles et qui réduit son empreinte carbone.
Il est intéressant de noter que la vague estivale de nouveautés poursuit plus avant la prise de conscience écologique des habitants de Lego City. En effet, si l’on fait abstraction des cascadeurs en tous genres, les ensembles sont fortement marqués par les défis climatiques contemporains que sont l’agriculture biologique, les circuits courts et les mobilités douces. La planète est donc en passe d’être sauvée, non ? (Non.)
Le bingo écomobilité chez LEGO : train, vélo, bus et trottinettes électriques, bornes de recharge et… des toilettes mobiles.
Fresh, c’est cool
En y regardant de plus près, ou plutôt en adoptant une vision d’ensemble, on constate que LEGO a introduit une nouvelle marque en ville, Fresh, à la fois producteur et distributeur agricole. La nouvelle entreprise est lancée en grande pompe, n’hésitant pas à s’afficher un peu partout avec une campagne marketing digne d’une vraie (intrusive et insidieuse). Ayons une petite pensée pour cette pauvre employée obligée de se déguiser en légume pour l’ouverture de l’épicerie.
Nous voici donc en présence d’une entreprise qui s’affranchit des intermédiaires et adopte une stratégie « Farm to fork » (« De la ferme à la fourchette »). Le camion de marché permet d’être au plus près des clients et le transport des marchandises se fait par rail. Le bilan carbone des produits est donc plutôt bon pour Fresh, sauf pour les œufs fermiers élevage plein air récoltés avec amour en quad.
Une campagne marketing agressive est déployée à travers la ville pour le lancement de Fresh.
Côté ferme, l’entreprise adopte une démarche de polyculture-élevage ; les déjections du bétail (bouses, lisiers, crottins, fientes, cacas) retournent au sol pour le maintenir fertile et donc productif. Ainsi, le bien-être des animaux en plastique est visiblement respecté, pour le plus grand bonheur de nos amis végétariens. Du bio, du local, de l’éthique, les habitants de Lego City sont chanceux, sauf pour les prix (3 €/kg de carottes bio, c’est du vol !)
Le bon côté des choses, c’est qu’il y a encore une grande marge de progression…
Au final, la marque Fresh n’est-elle qu’une tentative de greenwashing de LEGO ? Probablement. Son ajout à Lego City est-il une bonne idée ? Assurément. Car malgré quelques détails absurdes, il est important pour des jouets de transmettre aux enfants un imaginaire en adéquation avec son époque. En mettant l’accent sur une alimentation saine et en se détachant des énergies fossiles, LEGO revient de loin et fait des petits pas dans la bonne direction. C’est toujours ça de pris.